La salle à manger

Paire de grands vases

^{Paire de vases, vers  1909, André Metthey (1871-1920)
Terre vernissée polychrome
Hauteur : 54,4cm ; longueur : 38cm ; Largeur : 34cm
Signé du monogramme de l’artiste dans un cercle surmonté d’une croix
D.R.39}

Ces deux grands vases  ovoïdes  datent de la dernière période de production d’André Metthey.  Après des essais infructueux avec le grès (1892-1903), l’artiste adopte  la faïence stannifère (1903-1907) et vit ses premiers succès en collaboration avec des artistes fauves pour l’exécution des décors.  Insatisfait, il change à nouveau de technique de fabrication pour la terre vernissée et décide de tourner, décorer et cuir seul ses productions.  Il expose aux Salons des indépendants, d’automne et des artistes français et connaît la consécration en 1909, lors de l’exposition du Musée Galliera à Paris. 

Sur un fond vert, le décor des vases représente des scènes naturalistes de chasse (biche et cerf) et de pêche (poissons). Entourés de feuillages stylisés aux contours en léger relief, les corps des animaux sont recouverts d’une couche d’argent craquelé.  Sur les anses, les godrons du col et les bords inférieurs et supérieurs, l’artiste a utilisé un procédé de métallisation à l’or pâle obtenu par enfumage du four, technique  traditionnelle empruntée aux potiers orientaux. 

A partir de la fin du XVIIIe siècle, les techniques faïencières ont connu un lent désintérêt face à la porcelaine, céramique « noble » pleine d’avenir.  A travers sa production, André Metthey montre que leur renouvellement est possible, qu’accompagne un décor au langage stylistique qui lui est propre. Aujourd’hui, la production de cet artiste oublié se répartit entre musées et particuliers.  Trente pièces ont été acquises par le couple Salin. 
S. D. 

Carreaux muraux et plat

^{Carreaux muraux et plat, XVIe siècle, céramiques Iznik (Turquie)
Faïence émaillée de couleurs, décor de grand feu
Hauteur : 34cm ; Largeur : 34cm ; Profondeur : 2cm (D.R. 60.1, D.R.60.2)
Hauteur : 6cm, Diamètre : 30cm (D.R.61)
Hauteur : 24.5cm : Largeur : 36cm ; Profondeur : 2cm (D.R.62)
D.R.60-62}

La céramique Iznik désigne la production de faïences sorties des ateliers de la ville d’Iznik (ou Nicée, ancienne capitale byzantine) entre la deuxième moitié du XVe et la fin du XVIe siècle. Autrefois attribuée aux ateliers de Rhodes ou étiquetée « céramiques ottomanes », ce n’est qu’au milieu du XXe siècle que sa provenance originelle est établie.

La singularité de la céramique réside dans la pâte siliceuse enrichie en plomb et l’utilisation d’un engobe de même composition. Le décor est ensuite appliqué avant la pose d’une glaçure incolore et la cuisson.

La richesse du répertoire iconographique ainsi que la diversité de la palette, permettent aujourd’hui de proposer une évolution stylistique observée tout au long du XVIe siècle, dont les céramiques de Montaigu en révèlent quelques aspects. 

Pendant la première moitié du siècle, apparaissent successivement le bleu cobalt, le turquoise puis le vert, le rose et le gris. La thématique florale inspirée de modèles chinois est dominée par les bouquets de lotus et les rinceaux de fleurs. Les marlis (bords) sont recouverts de « vagues », rosaces, pétales de lotus, etc. (D.R.62). A partir de 1540, la palette s’enrichit d’un mauve aubergine. Les compositions végétales se complexifient. Les motifs du lotus, de la pivoine, de la tulipe, de l’oeillet, de la jacinthe et de la violette s’y associent avec exubérance (D.R.60-1, D.R.60-2). A la fin du siècle, le rouge tomate et le vert émeraude utilisés dans des représentations plus naturalistes feront la renommée de la céramique Iznik (D.R.61). 

La céramique Iznik est surtout connue à travers l’abondante production de carreaux de revêtement (D.R.60-1, D.R.60-2) que l’on admire sur les murs extérieurs et intérieurs du Palais Topkapi, de la Mosquée Süleymaniye (Soliman le Magnifique) ou encore dans la Mosquée Bleue à Istanbul.
S.D.

Ensemble mobilier

^{Ensemble mobilier (1907-1910), conception Adrien Karbowsky (1855-1945), réalisation Maison Krieger, Paris
Citronnier massif avec bois de placage en amarante et racines de citronnier
Estampillés A. Karbowsky : dix-huit chaises, une grande table, une table desserte, une grande console d’applique, une paire de petites consoles d’applique, un buffet vitrine
D.R.419-430}

A l’instar du grand salon, Adrien Karbowsky est aussi le concepteur de la décoration de la salle à manger. L’ensemble mobilier comprend tables, chaises, consoles et buffet commandés à la maison Krieger par Auguste Salin et donné à son fils Edouard.
 
L’esprit qui prévaut à la réalisation de ces meubles traduit une volonté d’associer les formes du passé à celles qui ont cours au début du XXe siècle. L’exemple des chaises est éloquent, sur lesquelles dominent, à parts égales, les lignes droites (avant) et courbes en forme de sabre (arrière) des pieds. Leur dossier, en forme de bandeau qui s’ouvre vers le haut, rappelle les créations de Georges Jacob au XVIIIe siècle. Elles sont en même temps une citation aux sièges « antiquisants » élaborés pour la villa Kérylos, autre chantier de Karbowsky à Beaulieu-sur-Mer. Les consoles affichent le même souci de contrastes subtils entre les contours rectilignes des meubles et les sinuosités des traverses et entretoises qui semblent ne servir que le décor. Sur le buffet, l’opposition est presque imperceptible entre le galbe des faces latérales et le décor métallique géométrique plaqué sur la vitrerie.

L’ornement en bois d’amarante et racines de citronnier incrustés est sobre. Il se compose de filets qui soulignent les structures, de motifs de lierre stylisé, de pampres de vigne et en étoile à peine visibles mais récurrents dans le répertoire décoratif de Karbowsky. 

Ainsi, l’historicisme et la modernité se conjuguent en un renouvellement des formes et de l’ornement qui visent une création originale d’une grande simplicité. 
S. D.

Tanagra

^{Tanagra (statuette), IVe-IIIe av. J.C., Grèce
Terre cuite, restes de polychromie
Technique : moule bivalve (moulé) et modelé (coiffure)
Hauteur:12.3cm ; Largeur: 5.7cm ; Profondeur: 4.5cm
D.R.27}

En 1870, lors d’une fouille clandestine opérée dans la nécropole du site grec de Tanagra en Béotie, plusieurs centaines de statuettes en terre cuite sont mises au jour. Elles suscitent alors un fort engouement auprès des collectionneurs et envahissent le marché de l’art ; des sculpteurs et peintres comme Maillol, Vuillard, Kupka s’en inspirent pour leurs créations. Parallèlement de nombreuses copies en terre cuite ou en plâtre sont proposées sur les marchés de rue.

Les recherches récentes ont montré qu’elles trouvent leur origine à Athènes au IVe siècle av. J.C. dont elles empruntent l’expression d’un style influencé par le théâtre et la grande sculpture. Rapidement, la production des statuettes se diffuse sur le territoire hellénique (Tanagra en Béotie devient un des centres les plus florissants) et tout le pourtour méditerranéen où des ateliers les reproduisent ou les adaptent aux coutumes locales. Dès le Ve siècle, les techniques de moulage permettent la fabrication de modèles et la production en série de ces figurines aux formes « standardisées ». 

L’intérêt de ces statuettes à usage funéraire, réside dans la valeur documentaire des modes vestimentaires et des techniques de fabrication qu’elles révèlent. Le Tanagra de Montaigu représente une jeune femme vêtue du chiton (tunique plissée d’origine ionienne réalisée en étoffe de lin ou de soie) recouvert de l’himation (manteau enveloppant dont les pans sont ici ramenés croisés sur le haut du corps). Elle est coiffée d’un chignon ceinturé par un bandeau et tient probablement un éventail de sa main gauche. Le revers de la figurine témoigne du moulage en creux obtenu à partir du moule prototype. L’ouverture permettait d’effectuer la soudure de deux éléments et assurer l’évacuation de la vapeur d’eau à la cuisson. Elle était ensuite obturée par une plaque d’argile aujourd’hui manquante. 

Dans les années 1950, le nombre de faux qui circulent sur le marché de l’art est tel que la mode des tanagras recule. 
S. D.

Vase grec ou œnochoé

^{Céramique peinte à figures noires sur fond rouge, à partir de 530
Grèce archaïque (VIIe-VIe av. J. C.)
Hauteur : 23.5cm ; Diamètre : 14cm
D.R.35}

Apparue à Corinthe dès le VIIe av. J. C., la technique de fabrication de la céramique peinte à figures noires sur fond rouge atteint son apogée pendant la période archaïque au VIe siècle av. J.C.  Sur la poterie argileuse, le peintre dessine le décor avec un enduit de couleur noire. Une succession de trois cuissons en atmosphère oxydante (la poterie devient rouge) puis réductrice (la poterie devient noire) et de nouveau oxydante, laisse in fine la céramique imperméable, les parties non enduites redeviennent rouges et les parties enduites restent noires. A partir du VIe siècle av. J.C, le procédé sera exploité de façon inversé laissant la place à la figure rouge sur fond noir. 

On connaît une multitude de récipients d’époques différentes et de pérennités variables, chaque typologie formelle destinée à un usage spécifique. L’oenochoé est une sorte de cruche qui servait à puiser du vin dans un cratère (grand vase utilisé pour le mélange du vin et de l’eau) et à le verser dans les coupes. L’exemplaire de Montaigu présente un pied, une panse ovoïde, un col étroit avec une embouchure trilobée et une anse verticale. Le décor s’organise en un panneau figuré au centre de la panse, encadré de bandeaux noirs sur le pied et le col. Des guirlandes stylisées agrémentées de liserés rouges et de motifs géométriques déterminent le panneau sur son pourtour. 

Identifié par les pampres de vigne, Dionysos est représenté ivre sur un cheval qu’accompagnent deux silènes. La typologie de la céramique et l’iconographie renvoient aux fêtes dionysiaques o¬ù la consommation du vin s’effectuait dans le cadre de rites et célébrations complexes. 

Le triomphe de Vénus

^{Le triomphe de Vénus [fragment], carton d’après Noël Coypel (1628-1707), tissage Manufacture des Gobelins, premier quart du XVIIIe siècle
Tapisserie haute lisse, laine, soie, fil d’or et d’argent
Hauteur : 127cm ; largeur : 278cm ; profondeur : 5.6cm
D.R.366}

Dans l’Antiquité, le triomphe désigne la cérémonie de consécration d’un général romain vainqueur défilant sur un char. Les parcours des cortèges très codifiés empruntent des passages symboliques sous des arcs-monuments construits pour l’occasion. A partir d’Auguste, cet honneur sera réservé uniquement à l’empereur et sa famille. 

A la Renaissance, le thème des triomphes est abondamment repris sur de nombreux supports pour représenter la puissance et la magnificence des dieux antiques. Des artistes comme Giulio Romano et Giovanni da Udine réalisent des cartons pour la création de tapisseries dédiées aux Triomphes des dieux et réalisées dans les ateliers de Bruxelles. 

Au XVIIIe siècle elles inspireront Noël Coypel qui peint de nouveaux modèles à l’imitation des Triomphes anciens mais dans le goût de l’époque. La confrontation d’une tenture, Le triomphe de Vénus (d’après les cartons de Coypel), fabriquée à la manufacture des Gobelins et conservée au Mobilier national avec la tapisserie de Montaigu, montre que cette dernière est un fragment découpé en partie basse et à droite d’une autre tenture identique probablement endommagée.

On y voit, sorties du tumulte des flots, des néréides (nymphes de la mer) portant des voiles gonflées par le vent. Elles chevauchent des centaures marins (mi-hommes, mi-poissons), deux présentent des offrandes en direction de Vénus (invisible) tandis que celui du milieu joue de la flûte de Pan.  A gauche, deux chevaux marins tirent le char guidé par Poséidon (invisible). 

Cette scène « marine » fait allusion à la naissance de la déesse, qui d’après une légende serait née de l’écume de la mer. 
S. D.